Scouts : sens et référence

Je comprends que l'abandon par les instances du scoutisme catholique de la référence à Dieu fasse l'effet d'une "bombe". Je voudrais ici dire que cela est normal dans une société sécularisée et surtout pluraliste. Le PSC en son temps a abandonné le C de chrétien mais les chrétiens ont continué à faire de la politique au nom de leur foi.

Il en est de même pour le scoutisme à la condition que celui-ci reste fidèle à son idéal. "Faire de scoutisme", ce n'est pas organiser une plaine de jeu. Cela semble une évidence mais beaucoup de chefs scouts ont démissionné pour ne faire que de la garderie.

Car en demandant à nos scouts de vivre à fond le scoutisme, nous formons, en même temps, des filles et des gars ouverts aux valeurs évangéliques. Les exemples foisonnent : le sens de l'autre apparaît dans une cour d'honneur, le sens du service est la raison d'être du pionnier; la primauté de l'humain peut être perçue par le scout lors de son raid de rencontre ou dans d'autre hike de découverte, ("le scoutisme sort enfin des bois"), le respect des personnes est exigé par l'aspect démocratique de la méthode.

Donc le plus important, ce n'est pas de se demander combien on a pu inscrire de messe ou de liturgie dans un camp mais bien plutôt de nous interroger sur le fait de savoir si nous appliquons parfaitement la méthode et la loi scoute .

La loi, par exemple, est l'épine dorsale du scoutisme. Elle est découverte par les contrats des grands projets éclaireurs et doit être l'idéal vécu à fond par les pionniers. Elle peut être envisagée sous deux aspects différents. D'abord, il y a loi "garde fou" qui accompagne l'action entreprise et vient comme référence en vue de juger les activités passées. Elle nous permet de savoir ce qu'on ne doit pas faire pour être fidèle à l'idéal scout. Ainsi le scout mettra un point d'honneur à ne pas dégrader la nature qui l'entoure. C'est elle qui nous dit comment nous comporter les uns vis-à-vis des autres. Ainsi dans les activités chacun s'efforcera d'être généreux et serviable.

La loi peut devenir aussi un tremplin, une boite à idées. Elle est alors considérée comme un idéal à atteindre, elle nous engage dans une action précise, elle nous propose des chantiers à réaliser, elle est inspiratrice de notre comportement. On l'a compris, la loi ici précède l'action. C'est ainsi que le scout ne se contentera pas d'admirer la beauté de la nature mais il apprendra à se rendre responsable du monde qui l'entoure. Par exemple en aidant, par un travail forestier, les syndicats d'initiative à faire aimer la nature, en organisant des camps-chantiers de dépollution d'un site industriel abandonné, etc.

Une autre valeur est l'apprentissage de la démocratie et de la vie en équipe. L'autorité toute puissante des chefs a sans doute disparu pour faire place à la collaboration de tous à l'organisation et au choix des activités. Donner des responsabilités à chacun selon ses talents permet de découvrir la vraie liberté qui consiste non pas à faire ce que l'on veut mais à choisir des projets passionnants. Une action, imparfaitement réalisée par un pionnier est préférable à la même action parfaitement accomplie par un chef.

Le scoutisme se veut projet éducatif en liaison étroite avec l'évolution des idées. Il doit donc promouvoir le pluralisme et les valeurs de tolérance. Aujourd'hui, les troupes sont ouvertes à tous, sans exclusion et la diversité des activités permet cette ouverture. Chacun, qu'il soit manuel ou intellectuel, étudiant ou travailleur, doit s'y sentir à l'aise. Le scoutisme de classe, espérons-le, a disparu. Mais cet accueil induit également un pluralisme religieux. Une troupe peut très bien accepter des jeunes qui ne croient pas ou des jeunes d'une autre religion. Ce sera possible puisque l'option de départ ne sera plus l'évangile mais la loi scoute. Cela permet de séculariser les exigences. On ne parle pas directement du Christ et de l'évangile mais des valeurs scoutes. Sur le respect de celles-ci tous les membres sont d'accord. Aux chrétiens de permettre aux croyants de faire la liaison avec leur foi.

Jean-Marie Delcourt