« Le scribe devenu disciple du Royaume des cieux est semblable à un propriétaire qui tire de son trésor des choses nouvelles et des choses anciennes. « (Mt 13,51-55)
Comment cette petite comparaison, un peu énigmatique , fait-elle le portrait du disciple de Jésus, en un mot du chrétien et même du prédicateur ?
Le trésor, ce sont les traditions bibliques dans lesquelles il peut puiser, pour nourrir sa foi, du neuf et de l'ancien. Du neuf, en découvrant la nouveauté de message évangélique et son intérêt pour le monde d'aujourd'hui. De l'ancien car son travail d'interprète doit se faire dans la fidélité aux racines de la foi. L'évangile est un texte qui a deux mille ans d'âge , écrit et prêché dans la mentalité juive du temps de Jésus , à savoir une société rurale, artisanale et sensible au merveilleux. Ce langage peut parfois nous déconcerter, mais si on parvient à dépasser son caractère désuet, nous découvrons une parole d'une grande profondeur et d'une incroyable actualité : le message de Jésus contient tous les remèdes pour guérir les maux de notre civilisation.
Pour paraphraser Jésus, nous pourrions dire que le disciple du Royaume est semblable à un antiquaire qui découvre , au fond d'un grenier, un meuble ancien mais recouvert de plusieurs couches de peinture qui, de ce fait, a perdu une grande partie de sa valeur. Pour retrouver la beauté de ce meuble, l'artisan va le décaper et faire apparaître le bois d’origine , peut être un peu craquelé, mais combien plus beau, trouvant ,même sa place dans un décor contemporain.
Ainsi en est-il de la Parole de Dieu, quand après une interprétation sérieuse, elle nous fait voir une grande sagesse dont nous pouvons encore nous inspirer aujourd'hui.
Donnons quelques exemples.
En disant «le sabbat a été fait pour l'homme», il nous rappelle cette vérité fondamentale : si l'homme doit travailler pour vivre, il ne doit pas seulement vivre pour travailler. Sa vocation dépasse largement le domaine de l'économie. Le dimanche n'est pas seulement un jour réservé au culte mais il joue aussi un rôle social indispensable dans notre société productiviste.
En disant «l'homme ne vit pas seulement de pain», il nous rappelle que l'homme a autant besoin de raisons de vivre que de moyens d’existence. Il existe une soif de spiritualité non assouvie dans notre époque matérialiste. L'homme contemporain souffre de deux carences : l'insatisfaction de l'avoir et l'insuffisance de l' être.
En disant «rendez à César ce qui est à César...», il n'invente pas seulement la laïcité, la séparation entre l’Église et l’État mais il condamne toute forme d’idolâtrie, car la citation sous entend «et ne rendez pas à César un culte qui doit être rendu à Dieu.»
En disant «remets ton épée au fourreau et prône l'amour des ennemis», il propose la non-violence pour résoudre les conflits et met en avant les artisans de paix, dans ses Béatitudes.
En disant «ce que je désire, ce sont des adorateurs en esprit et en vérité...» il fait entrer la religion chrétienne dans la modernité avant la lettre, en désacralisant à la fois l'espace, les temples, les objets du culte et même le clergé, ce que le protestantisme appliquera dans « le sacerdoce universel des baptisés ».
En disant : «Vous ne pouvez pas servir deux maîtres, Dieu et Mammon», il voulait dire «ne faites pas du profit un dieu et de l'économie de marché votre religion».
A vous de continuer la liste des propos novateurs et subversifs de Jésus.