Après la tuerie d'Oslo : tolérance ou exclusion

Nous sommes à la croisée des chemins : voulons-nous une société basée sur la tolérance ou l'exclusion ? Le tueur d'Oslo avait choisi ; pour lui, la société norvégienne était trop métissée, trop laxiste avec les étrangers surtout ceux qui se réclament de l'Islam. C'était paraît-il un fondamentaliste chrétien. Ce n'est pas un oxymore, c'est une contradiction dans les termes.

Il est impossible d'être chrétien et « fondamentaliste » en même temps. Un chrétien qui s'inspire de l'évangile ne peut être partisan d'une société d'où l'étranger est exclu. Et on est vite l'étranger de quelqu'un d'autre. Il suffit d'être un peu basané, de ne pas être patriote, de ne pas être nationaliste, de ne pas adhérer à la même foi ou pire d'être athée pour être vite catalogué « étranger ».

Par contre, qu'il soit issu de l'extrême droite peut expliquer son comportement meurtrier. Car l'histoire nous apprend comment de telles idées apparentées à l'idéologie nazie ont engendré génocides et tueries atroces.

Le populisme est occupé à gangrener toutes les composantes de nos sociétés civiles et religieuses : de la démocratie à la religion. C'est pourquoi il est urgent de revenir aux « fondamentaux » et de la foi et de la démocratie.

La tolérance de Jésus 

Jésus était tout le contraire d'un fondamentaliste, d'un conservateur, puisqu'il voulait, par un retour aux sources, réformer la religion juive de son temps, pour la rendre plus spirituelle, plus universaliste. Il est mort parce qu'il prônait un Royaume de Dieu, ouvert, juste, tolérant où chacun serait libre d'exercer sa religion, sa croyance ou sa non-croyance.

Un jour l'apôtre Jean, l'évangéliste, demanda au Christ qui avait été mal reçu dans un village de Samarie, de « faire descendre le feu du ciel et de consumer les récalcitrants ». Jésus irrité par tant d'intolérance le réprimanda sévèrement et partit dans un autre village (Lc 9,51-55). Souvenez-vous aussi de la parabole du "bon grain et de l'ivraie" qu'il propose de laisser pousser ensemble ! Le Christ est patient, il a horreur du fanatisme. Il veut respecter le cheminement de chacun, il croit en l'homme perfectible. 

Peu après, le Jamboree scout mondial 

Comme une réponse à ce drame atroce, se tenait quelques jours après, le 22e Jamboree mondial du scoutisme qui avait pour thème : « Vivre ensemble au-delà des frontières de la religion, de la nation ou de la couleur de peau ». C'est en effet, à Kristianstad, en Suède, un pays proche, que, pendant deux semaines, 40 000 scouts se sont rassemblés. Comme tous les quatre ans, ils étaient venus de 150 pays pour mieux se connaître. Le slogan était « Le scoutisme, tout simplement » avec ses trois axes : les rencontres, la nature et la solidarité.

Le 1^er Jamboree a eu lieu après la guerre 14-18 pour promouvoir la paix entre les peuples. Ainsi, depuis 1920, l'idée est toujours la même : proposer à des jeunes de vivre ensemble pour mieux se connaître, se comprendre et ainsi ne plus utiliser la violence.

Pendant ce camp, un peu exceptionnel, tout a été mis en œuvre pour "vivre le multiculturalisme" contre lequel militait le "tueur d'Oslo". Lieux, activités, cérémonies ont été organisées dans le but de multiplier les rencontres. Les jeux ne pouvaient se dérouler qu'avec des groupes de différentes nationalités. Le soir, chacun s'invitait à dîner au-delà des frontières : les Suisses chez les Espagnols et les Français chez les Vénézuéliens.

Au milieu du camp se dressaient un minaret gonflable et une tente mosquée, partie intégrante de la zone "foi et croyance" qui rassemblait onze religions. "J'espère bien pouvoir montrer ce que ma religion m'enseigne et lutter contre les clichés" confiait un scout égyptien à un jeune chrétien qui se rendait à la prière avec lui, attiré par la curiosité.

Le jeudi 28 juillet, les 40 000 scouts ont observé une minute de silence en souvenir des victimes d'Oslo. «Lors de cette minute de silence, » disait une jeune participante, « on s'est rendu compte qu'on partageait tous les mêmes valeurs, celles des scouts».

Jean-Marie Delcourt