Paul, sur les routes de l'Evangile

Paul est son nom d'apôtre ; en réalité, il s'appelle Saul. Né à Tarse -Turquie actuelle- au début du 1er siècle, dans une famille de drapiers, il est citoyen romain par ses parents. Il fait des études supérieures et connaît les auteurs grecs et suit une formation de rabbin à Jérusalem.

Jeune, il a appris le métier de tisserand, ce qui lui permettra de gagner sa vie. Petit, chauve, jambes arquées, nez busqué, maladif, c'est d'abord un pharisien zélé. Il défend un judaïsme pur et dur qu'il pense être mis en danger par les disciples d'un certain Jésus. Il sollicite du grand prêtre de Jérusalem la mission de les arrêter. Le voilà persécuteur patenté des chrétiens. Il ne peut admettre que le Messie puisse avoir été crucifié. Il n'a pas connu le Christ personnellement mais va faire sa découverte de façon brusque et inattendue.

Il est avec son escorte sur la route de Damas quand une lumière l'éblouit soudain. Les chevaux se cabrent, il tombe et entend une voix qui lui dit : "Saul, pourquoi me persécutes-tu ?" Cette rencontre va bouleverser sa vie. Il se convertit au christianisme et de persécuteur, il va devenir apôtre. Avec la même, ardeur, il va se mettre au service du Christ qu'il découvre au contact des apôtres, de ceux qui l'avaient fréquenté sur les routes de Palestine. Ses discours provoquent consternation et colère dans les milieux juifs mais il n'est pas mieux accueilli par les chrétiens de Jérusalem que son passé rend suspect .

Il va militer pour que le souffle de l'Esprit balaie tout sur son passage. "La lettre tue, l'Esprit vivifie" écrira-t-il. C'est lui qui va ouvrir l'Eglise du Christ aux païens, on l'appellera "l'apôtre des nations". Pour ce faire, il devra même s'opposer à Pierre et aux communautés de Jérusalem (les juifs convertis).

Il a été le premier à comprendre que pour devenir chrétien, le baptême pouvait suffire. Certains, comme Pierre, pensaient qu'il fallait encore imposer la circoncision et toutes les obligations de la loi de Moïse. Ce débat fut tranché en sa faveur lors du premier Concile de Jérusalem. Sans cette décision, la religion chrétienne n'aurait jamais eu l'extension qu'elle allait avoir au cours des siècles. Il avait compris qu'il fallait sortir des frontières de Palestine pour annoncer l'Evangile jusqu'aux confins de l'Empire Romain.

Voyageur infatigable, il va parcourir l'Asie mineure, prendre plusieurs fois le bateau, fonder des communautés chrétiennes en Turquie, en Grèce (à Athènes, Corinthe, Thessalonique, Philippes) et même à Rome. Ces voyages montrent un besoin vital de contact. Les visites de Paul se déroulent toujours de la même façon. Après être chassé de la synagogue, il proclame alors sa foi aux païens sur les lieux publics. Quelques individus sont touchés, ils vont former l'amorce d'une petite communauté qui, par la suite, s'étendra et à laquelle il rendra visite dans ses voyages ultérieurs. Quand il ne pourra pas s'y rendre, il leur écrira de longues lettres appelées "Épîtres". Il y développe ce qui lui paraît essentiel dans la foi chrétienne mais aussi des conseils pour la vie de tous les jours. Il met l'accent sur l'idée que le salut ne s'achète pas, ne se mérite pas par nos efforts mais qu'il est un don gratuit de Dieu, accueilli dans la foi. C'est l'amour de Dieu qui a poussé Paul à entreprendre tous ces voyages, à prononcer toutes ces prédications, à écrire toutes ces lettres et à subir mille souffrances : "Souvent j'ai été à la mort. Cinq fois, j'ai reçu des juifs les 39 coups, trois fois j'ai été flagellé, une fois lapidé, trois fois j'ai fait naufrage…" (2 Co 11, 23-25).

Finalement, arrêté à Jérusalem, il met en avant sa citoyenneté romaine pour être jugé à Rome. Après deux ans de prison à Césarée, il s'embarque à Tyr avec d'autres prisonniers dans un bateau qu'une tempête effroyable va faire échouer au large de Malte. Arrivé en Italie, il rejoint Rome à pied pour y être, sans doute, décapité vers l'an 67. 

Réunis par la liturgie dans une même fête (le 29 juin) Pierre et Paul sont les deux colonnes de l'Eglise. Le premier et le dernier apôtre. Différents et opposés, ils sont cependant complémentaires. L'un rassure et conforte, l'autre risque et ouvre des fenêtres. L'un maintient et rassemble, l'autre ose et crée.

Jean-Marie Delcourt