Aquila : Solidarité à la Une

Un cercueil blanc, celui d'un enfant, posé sur un autre de plus grande taille, celui d'un père ou d'un mère. Telle est sans doute l'image poignante qui restera des funérailles des 295 victimes du tremblement de terre le plus meurtrier de l'Italie depuis 30 ans. Durant la messe d'enterrement présidée par le cardinal Bertone, un message du pape Benoit XVI à été lu devant les familles des victimes et les rescapés qui se terminait ainsi : "Seule la solidarité peut permettre de surmonter des épreuves aussi douloureuses". Et ce n'est pas peu dire que la solidarité bat son plein à Aquila, ville des Abruzzes, devenue le symbole d'un drame qui a profondément ému les italiens d'Italie et d'ailleurs.

Très vite, tout le pays s'est mobilisé pour venir en aide aux milliers de sans abris ainsi qu'à tous les blessés dans leur corps et leur âme. Treize camps de tentes ont été montés rapidement, avec l'aide de la Protection Civile et d'une trentaine d'organisations de Caritas à la Croix Rouge. Des dons ont afflué, une centaine de cartons de vêtements arrivaient chaque jour. Des centaines de jeunes, étudiants, scouts ou anonymes, se sont portés volontaires pour aider les rescapés. Sur la Place d'armes, ils étaient partout : déguisés en clowns pour amuser les petits ou jouant au foot avec les plus grands. Tout était fait pour soulager l'angoisse des enfants et venir en aide à leurs parents. Et tenter d'oublier les 20 secondes qui ont bouleversé leur vie.

Une Église détruite et une qui se mobilise. Une dizaine de franciscains d'un monastère d'Ombrie tout proche sont venus spontanément réconforter les habitants. Ils ont aménagé une chapelle dans une tente et deux chaises de jardin y forment un confessionnal improvisé. Le Vendredi Saint, la petite communauté a même organisé un chemin de croix le long de la piste d'athlétisme. Un peu à l'écart de la foule, un homme aux traits marqués ne pouvait cependant s'empêcher d'exprimer ses doutes : "Et Dieu, où était-il cette nuit là ?"."L'angoisse du tremblement de terre est derrière eux, souligne un frère franciscain, mais le plus dur reste à faire : repartir à zéro et tout recommencer".

Et surtout envisager la reconstruction de la ville détruite. Le président du Conseil Silvio Berlusconi semble prendre ce projet à bras le corps. Lui qui parfois sait faire le pitre et n'est pas avare de blagues douteuses s'est impliqué personnellement d'une façon exceptionnelle. Il est venu presque tous les jours pour réconforter les habitants meurtris par le séisme, écouter leurs doléances et leur promettre de ne pas les laisser tomber. "Nous pouvons refaire les maisons en deux ans" dit-il en s'improvisant chef de chantier. Espérons que cette fois les normes antisismiques seront respectées. Ce qui n'était pas le cas pour toutes les maisons d'Aquila : le béton armé présentant du fer en trop faible quantité. Pour les bâtiments historiques comme l'église médiévale dont le dôme s'est effondré, il a aussi sa petite idée : "confier la restauration d'un monument classé à un pays qui en ferait la demande".

Nous avons connu un séisme d'une même amplitude dans le domaine économique et social. Ce magnifique élan de solidarité doit nous interpeler et remettre en question nos comportements trop souvent égoïstes. La solidarité a toujours permis à nos sociétés de garantir une cohésion sociale, gage d'un bien vivre ensemble, qui exclut la peur et la haine de l'autre. Elle permet de dépasser l'assistance et l'aumône en introduisant des mécanismes d'entraide au sein du corps social : les bien portants cotisent pour les malades, les travailleurs pour les sans emploi, les actifs pour les pensionnés, les adultes pour les jeunes. Et surtout les riches envers les pauvres. C'est l'impôt qui, dans nos sociétés démocratiques, redistribue la richesse . Si on veut que la crise actuelle ne se transforme pas en insurrection violente, c'est cela qu'il faut d'urgence envisager. Beaucoup de gouvernements hésitent par peur de déplaire à leurs électeurs. Votons pour des partis qui mettent la solidarité en première ligne.

Jean-Marie Delcourt 
avec l'aide de La Vie